Dalí avait mille obsessions, dont deux des plus maladives étaient La Dentellière, le célèbre tableau de Vermeer, et les cornes de rhinocéros. La première lui est venue dès l’âge de neuf ans. La seconde résulte de la perfection naturelle et quasi-divine qu’il prêtait aux cornes du rhino. En 1954, Dalí est à Paris. Il exige une visite privée du Louvre pour partager un moment privilégié avec son œuvre fétiche. Il s’est alors lancé un défi : reproduire La Dentellière en une heure. Ne pouvant atteindre son objectif, le peintre déçu a décidé de se rabattre sur sa seconde obsession : les rhinocéros. Au zoo de Vincennes, Dalí aménage son atelier improvisé : un chevalet planté au milieu de l’enclos, une brouette en guise de siège. Face au rhino, François de son petit nom, une reproduction de La Dentellière que l’animal est sensé charger et transpercer de sa corne. Artiste loufoque et déluré, Dalí demande à ses assistants de l’affubler d’une corne fictive, pour qu’il se sente au plus près de l’animal colossal auquel il fait face. Un quignon de pain posé sur la tête, le peintre s’applique méthodiquement à représenter sa vision des cornes, formée en réalité selon des spirales logarithmiques. Boudeur, François ne se décidera jamais à charger La Dentellière. De toute façon, il n’est pas super bien équipé en kératine. Résigné à la fatalité qui lui fait enchaîner les échecs, Dalí transpercera finalement lui-même la reproduction à l’aide d’une immense lance, appréciant l’espace de quelques secondes la douce condition du rhino. Source : Mashable