La réserve mondiale de semences de Svalbard, qui abrite des milliers d’espèces végétales cultivables, pourrait jouer un rôle décisif dans les siècles à venir en matière de préservation de la biodiversité mondiale. C’est sur l’île du Spitzberg, dans l’archipel norvégien de Svalbard, que sont centralisées et conservées les semences du monde entier. Riz, blé, tomate ou courgette : plus de 541 millions de graines issus de 5 128 espèces différentes sont ainsi précieusement stockées dans cette chambre forte. Créée en février 2008, la réserve mondiale du Svalbard est une véritable arche de Noé de la biodiversité. Située à 1 100 kilomètres du pôle Nord, elle semble tout droit sortie d’un roman de René Barjavel. Construite pour survivre aux guerres, aux catastrophes naturelles et à l’épreuve du temps, elle conserve des échantillons de graines de toutes les régions du monde en quantité suffisante pour pouvoir réimplanter les espèces dans les zones où elles auraient disparu. La chambre forte n’abrite aucun laboratoire et aucune expérience n’est directement menée sur le site. La réserve ouvre ses portes trois fois par an pour recevoir des copies d’échantillons envoyées par différents pays. Le reste de l’année, elle demeure scellée, avec pour seul gardien un système d’alarme dernière génération. Mais le véritable enjeu pour l’institution est de s’assurer que les graines, conservées à 120 mètres sous terre, germeront toujours lorsqu’elles seront replantées des dizaines ou des centaines d’années plus tard. C’est la raison pour laquelle l’ensemble des semences est conservé à -20°C, une température très basse qui permettrait de préserver le potentiel de germination des graines pendant plusieurs siècles. Depuis sa création, la réserve tente ainsi d’amener l’ensemble des pays du monde à coopérer et à fournir des échantillons provenant de leurs bibliothèques nationales. Et si la France se montre particulièrement réticente sur le sujet, la Corée du Nord a, contre toute attente, accepté de prendre part au projet. Elle conserve ainsi un container à son nom sur l’île du Spitzberg. Un détail d’importance, puisqu’il s’agit du seul programme de coopération internationale auquel elle participe. Si la création de la réserve a réveillé de nombreuses craintes (risque d’apocalypse, d’explosion d’astéroïde ou d’incident nucléaire d’envergure), la réserve a avant tout été mise en place pour réapprovisionner les régions dans lesquelles le temps ou les conflits armés accélèrent dangereusement la disparition de certaines espèces. L’an dernier, la banque de gènes syrienne a ainsi été entièrement détruite à Alep à la suite d’affrontements violents ; les scientifiques se sont donc tournés vers la réserve de Svalbard pour reconstituer leurs stocks. La collection de Svalbard est loin exhaustive, la chambre forte ne rassemblant pour le moment que 40 % de la diversité génétique végétale agricole mondiale, mais elle espère bientôt abriter l’ensemble des espèces cultivables. Un projet titanesque à la mesure de l’enjeu. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, les trois quarts de la biodiversité cultivée a disparu des campagnes au cours du siècle dernier. Un chiffre alarmant qui renforce la légitimité du projet. Crédits : Réserve mondiale de semences de Svalbard Une expédition rocambolesque au pôle Nord. ↓