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« La Corée du Nord ferait mieux de ne plus adresser de menaces aux États-Unis. Elles seront accueillies par le feu et la fureur, le monde n’aura jamais vu ça », a déclaré le président Trump le 8 août 2017. Des paroles incendiaires exprimées à la suite de menaces proférées par Pyongyang à l’encontre de la première puissance mondiale, au lendemain des nouvelles sanctions économiques décidées par les Nations Unies contre le régime de Kim Jong-un. Une nouvelle étape est franchie dans l’escalade des tensions entre les deux pays, dont le point culminant est à peine vieux d’un mois. On se rappellera peut-être longtemps du mardi 4 juillet 2017. Non pas comme d’une fête nationale américaine mémorable, mais comme du jour où le régime nord-coréen a annoncé au monde entier qu’il possédait des missiles balistiques intercontinentaux en parfait état de marche. D’abord contestée par le Commandement Pacifique américain, cette nouvelle glaçante a fini par être confirmée par le Pentagone : oui, Kim Jong-un est désormais capable de frapper n’importe quel endroit du monde. Ce qui n’est pas une bonne nouvelle au vu des tensions qui règnent entre la dictature communiste et les États-Unis d’Amérique. Déjà le 2 mai 2017, la Corée du Nord, par le biais de son organe de presse officiel, KCNA, déclarait sans détour que la péninsule coréenne était « au bord de la guerre totale ». Des propos extrêmement inquiétants émis en réaction au survol de son territoire par deux bombardiers américains. Pour l’US Air Force, il s’agissait d’un « exercice » mené conjointement avec les forces aériennes sud-coréennes et japonaises. Pour les Nord-Coréens, ce n’était rien moins qu’une intolérable « provocation » agitant la menace de bombardements nucléaires en représailles de la poursuite de son propre programme d’armement nucléaire.

Un test de missile balistique intercontinental réussi par Pyongyang
Crédits : KCNA

« Toute provocation militaire contre la République populaire démocratique de Corée déclenchera une guerre totale qui conduira au jugement dernier pour les USA », disait le communiqué de l’agence centrale de presse nord-coréenne. Une déclaration sans appel qu’on aurait tort de ne pas prendre avec sérieux tant les tensions qui entourent la péninsule coréenne sont palpables ces derniers mois. À tel point que certains y voient l’épicentre possible d’une Troisième Guerre mondiale, entraînant avec elle tous les acteurs de la région et leurs alliés. Car si isolée qu’apparaisse la Corée du Nord, elle compte pourtant des alliés partout sur la planète, bien que la Chine et la Russie aient approuvé le 5 août dernier les sanctions économiques destinées à juguler les ambitions militaires de Kim Jong-un. Mais le 15 avril, lors du 105e anniversaire de feu le dictateur Kim Il-sung, père fondateur de la nation et grand-père de son actuel leader, le régime avait organisé un véritable opéra accompagné d’images outrageantes. Au terme du spectacle fiévreusement patriotique, des missiles étaient tirés sur l’écran, s’envolant vers les États-Unis pour les réduire en cendres. Une cérémonie à laquelle participait évidemment Kim Jong-un, troisième de la lignée tyrannique qui règne sur le pays depuis sa fondation en 1948.     Que sait-on vraiment de Kim Jong-un, « maréchal de la République populaire démocratique de Corée », « grand successeur de la cause révolutionnaire du Juche » et « Soleil du XXIe siècle » aux yeux de son peuple ? Les spéculations vont bon train, son passé est tissé de légendes, nombre de fake news lui collent à la peau, tandis qu’un cortège d’horreurs bien réelles le suivent comme son ombre. Pour y voir plus clair, plongez dans l’intimité du dictateur le plus énigmatique de la planète.

Kim Jong-un au ski
Crédits : KCNA

En tyran implacable, Jong-un a ordonné la mort d’un nombre considérable de personnes, souvent proches de lui. Le plus récent de ces assassinats serait celui de son demi-frère Kim Jong-nam, en février dernier. Mais avant lui, le dictateur aurait fait tuer d’autres membres de son entourage, parmi lesquels son oncle Jang Song-thaek, la chanteuse Hyon Song-wol et le militaire Hyon Yong-chol. Il s’est avéré par la suite que certains de ces assassinats n’avaient jamais eu lieu, mais seulement au terme d’une enquête particulièrement retorse. L’assassinat n’est toutefois pas l’apanage de Kim Jong-un, fils de Kim Jong-il et petit-fils de Kim Il-sung. À la fin des années 1960, le premier dictateur de la Corée du Nord entreprit une violente guérilla qui s’achèverait avec une spectaculaire tentative de meurtre de l’autre côté de la frontière. Enfin, s’il ne s’agit pas à proprement parler d’un assassinat – bien que nul ne sache vraiment ce qui s’est passé –, le 13 juin dernier, la Corée du Nord a renvoyé chez lui un ressortissant américain arrêté là-bas en mars 2016… dans le coma. Hélas, le malheureux Otto Warmbier, étudiant de 22 ans à l’époque du drame, est décédé quelques jours après son retour aux États-Unis. Une nouvelle sordide qui n’a pas assoupli les tensions entre les deux puissances.     La Corée du Nord, c’est aussi un peuple, qu’on sait oppressé, miné par la pauvreté et en proie à un régime autoritaire et dément. Il nous parvient régulièrement des images, des sons, des histoires d’entre les frontières du pays, dont certaines corroborent l’idée qu’on se fait de la vie sous la férule d’un tyran excentrique. Il semblerait notamment que chaque matin, les habitants de Pyongyang se réveillent au son de cette mélodie ultra-flippante. Des images satellites attestent également que lorsqu’ils ne testent pas leurs nouveaux missiles, dont le premier essai a eu lieu en 1984, les ingénieurs nord-coréens jouent au volley ou au basket sur les sites nucléaires du pays. (Ils adorent le basket. Pour preuve, l’ancienne star de la NBA Dennis Rodman est retourné pour la deuxième dans le pays en juin 2017.) Parfois, pourtant, les images racontent une autre histoire, comme cette série de photographies rarissime, prise dans le métro de Pyongyang, où le silence semble être à l’honneur parmi les habitants de la capitale nord-coréenne. Les habitants du pays sont aussi très friands de photographie, et particulièrement 3D.

Crédits : Christian Petersen-Clausen

Ces dernières années, des transformations significatives semblent être à l’œuvre dans certaines zones du pays comme à Pyonghattan, un quartier de Pyongyang où le commerce de biens et les opérations financières sont autorisées depuis 2002. Quinze ans plus tard, on assiste à l’émergence d’une classe de « nouveaux riches » nord-coréens dont les portraits pris sur le vif en 2015 et 2016 tranchent avec l’idée générale qu’on se fait de la vie quotidienne en Corée du Nord. Une vie améliorée en partie par l’afflux touristique croissant que connaît le pays, grâce aux amateurs de tourisme dark. À leur intention, des internautes ont établi un palmarès des meilleurs restaurants du pays… On ne vous recommande pas d’y passer votre lune de miel, mais si jamais vous posez vos bagages de ce côté du monde, voici à quoi ressemble un tour gastronomique de Corée du Nord. Mais le régime de Pyongyang tire aussi profit des citoyens qu’il envoie travailler dans des conditions misérables à l’étranger, comme en Russie où ils participent à construire un stade à Saint-Pétersbourg qui accueillera la prochaine Coupe du Monde de football.     Qu’on ne s’y trompe pas, la Corée du Nord est tout sauf une attraction et des gens du monde entier luttent à leur niveau pour déstabiliser le régime de Kim Jong-un et venir en aide à la population locale. L’une de ces initiatives, Flash Drives for Freedom, propose d’envoyer des clés USB chargées de séries, de films, de musique et de livres étrangers pour faire entrer en douce la culture mondiale dans le pays et lutter contre la propagande du régime. La figure de proue de ce mouvement de résistance est un dénommé Park Sang-hak, déserteur nord-coréen qui s’est juré d’aider les siens sans relâche depuis la Corée du Sud. Et pour cela, il a choisi un moyen peu banal : il fait voler des ballons par-dessus la frontière, qui portent des messages et des denrées à destination des citoyens du Nord. Peut-être sont-ils désormais lestés de clés USB pour accroître leur impact.


Couverture : Kim Jong-un. (KCNA)