Crédits : NYT/Gordon Welters Dans son livre La Vie secrète des arbres, l‘ingénieur forestier allemand Peter Wohlleben explique que pour sauver les forêts de notre planète, nous devons d’abord reconnaître que les arbres sont « des êtres extraordinaires ». D’après le scientifique, ils sont dotés d’une faculté d’adaptation innée et capables d’intelligence, de communiquer entre eux et même de se soigner les uns les autres. En bref, les arbres sont des créatures sociales. À l’école de sylviculture, il avait appris à ne voir les arbres que comme une denrée économique. Mais après avoir intégré une société forestière et s’être occupé de gérer une forêt, il a fini par déchanter des pratiques chimiques et mécaniques qui font passer le rendement immédiat avant la durabilité. Le maire de la ville l’a engagé à son tour pour qu’il veille sur la forêt, dont il s’occupe depuis sans utiliser d’insecticides ou de machinerie lourde – tous les arbres sont taillés ou coupés à la main et tractés par des chevaux. Dans un entretien avec le magazine Yale Environment 360, Wohlleben explique à quel point les arbres sont des êtres sophistiqués. « On apprend à l’école que l’évolution avance en dressant les individus les uns contre les autres dans une lutte pour leur survie », dit-il. « Eh bien les arbres sont eux aussi en compétition. Ils luttent les uns contre les autres pour plus d’espace et de lumière. Mais nous avons appris récemment que les individus d’une espèce travaillent également ensemble, ils coopèrent. » Il raconte que les arbres mères nourrissent les plus jeunes en leur donnant juste assez de sucres, produits à partir de leur propre photosynthèse, pour les tenir en vie. Dans une forêt, les arbres d’une même espèce sont connectés les uns aux autres par leurs racines, qui fonctionnent comme un gigantesque réseau. L’extrémité de chaque racine est pourvue de structures pseudo-cérébrales extra-sensibles, qui lui permettent de distinguer si les autres racines qu’elle rencontre en poussant sont les siennes, celles d’une autre espèce ou si elles appartiennent à des individus de sa propre espèce. « Si elles rencontrent des racines de leur espèce, nous avons mesuré avec des molécules de sucre marquées radioactivement qu’elles transmettent de la nourriture et de l’énergie aux arbres en mauvaise santé », raconte Wohlleben, qui ne sait pas si la science sait encore l’expliquer. Les arbres communiquent également entre eux via un réseau de champignons souterrain. « Quand un arbre est attaqué par des insectes, nous pouvons mesurer des signaux électriques qui passent dans son écorce, puis dans ses racines et enfin à travers des réseaux fongiques dans le sol. Ils alertent les arbres voisins du danger. » D’après l’ingénieur, les arbres « paient » pour ce service en fournissant aux champignons des sucres issus de leur photosynthèse. Enfin, Peter Wohlleben certifie que les arbres connaissent l’amour. « Dans environ un cas sur 50, on voit deux arbres qui ont des attentions spéciales l’un envers l’autre. » Il raconte qu’il a récemment vu deux hêtres, poussant côte-à-côte, dont les branches étaient tournées de façon à ce qu’elles ne poussent pas dans la direction du compère. « Habituellement, ce n’est pas le cas. Les arbres ont pris cette décision. C’est une des façons dont les arbres témoignent leur égard pour l’autre », dit-il. Lorsqu’il voit de tels arbres, il sait que si la nécessité se présente, il faudra les couper tous les deux. « Si vous n’en coupez qu’un, l’autre mourra de toute façon. » Vendu à plus de 400 000 exemplaires en Allemagne, le livre de Peter Wohlleben a été traduit en 32 langues et le New York Times lui a accordé un long portrait. Source : Yale Environment 360