À la table de Kim Jong-un, quelques officiers bardés de médailles tapent dans leurs mains. Ce dimanche 9 juillet, le dictateur nord-coréen et son état-major contemplent leur dernier fait d’armes en musique. Plusieurs centaines d’invités les accompagnent dans une grande salle sombre balayée par des stroboscopes rouge et blanc. Derrière la scène où se succèdent les musiciens, un écran diffuse les images d’un missile qui prend son envol. L’assistance applaudit les bras levés. Le même jour, sur les écrans de CNN, l’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Nikki Haley, est beaucoup moins enthousiaste. Aux États-Unis, personne n’a sauté de joie lorsque Pyongyang a annoncé avoir réussi le tir d’un missile balistique intercontinental, le 4 juillet. Avec cette technologie, les Nord-Coréens assurent être en mesure de frapper n’importe quel endroit du globe. « Nous allons mettre la pression, pas seulement sur la Corée du Nord, mais aussi sur les pays qui ne respectent pas les résolutions [des Nations unies] et n’appliquent pas les sanctions contre la Corée du Nord », menace Haley au cours de l’interview.
La diplomate vise avant tout la Chine, comptable, dit-elle, de « 90 % des échanges nord-coréens », mais pas seulement. Deux jours après l’annonce, à l’ONU, la Russie bloquait un projet américain de déclaration appelant à prendre des « mesures significatives » contre la « république populaire ». En dehors de ses deux grands voisins, « beaucoup de pays africains, d’Asie du Sud-Est ou du Moyen-Orient n’appliquent pas les sanctions de façon stricte », remarque le chercheur Antoine Bondaz, auteur du livre Corée du Nord: plongée au cœur d’un État totalitaire. Non seulement des « coopérations officieuses » existent mais la Corée du Nord « n’est pas un royaume ermite », rectifie-t-il. Ses relations sont même assez nombreuses.
Le vide stratégique
Des cortèges de camions traversent chaque jour le fleuve Yalou sur le pont de l’Amitié sino-coréenne. Construit en 1943, l’ouvrage en acier résiste au temps, aux sanctions et aux attaques de Donald Trump contre l’histoire. Dans un entretien accordé au Wall Street Journal le 4 avril 2017, le président américain a affirmé que la péninsule « a été autrefois une partie de la Chine », alors qu’elle ne s’est jamais trouvée officiellement sous son contrôle direct. Le pont qui relie les deux rives du Yalou a été détruit par l’US Army pendant la guerre de Corée, en 1950, avant d’être remis sur pied. Aujourd’hui, Trump n’est pas loin de réclamer son anéantissement, sans égard pour la souveraineté des deux « amis ». Quand il a appris le nouveau lancement d’un missile par Pyongyang, mardi 4 juillet, le milliardaire s’en est d’abord pris à Kim Jong-un, avec lequel il disait pourtant vouloir manger un hamburger pendant sa campagne. « Est-ce que ce mec n’a pas mieux à faire ? » a-t-il demandé sur Twitter. Depuis son accession au pouvoir, Trump « souffle le chaud et le froid » sur le dossier nord-coréen, indique Théo Clément, chercheur à l’Institut d’Asie orientale. Sa méconnaissance est assez partagée aux États-Unis : d’après une étude publiée par le New York Times le 5 juillet, 64 % des Américains sont incapables de situer la Corée du Nord sur une carte de l’Asie. Leur position à son encontre est par conséquent elle aussi difficile à cerner.
Si la Maison-Blanche témoigne selon Antoine Bondaz d’un « manque de stratégie », elle ne s’en répand pas moins en déclarations agressives. Après la mort de l’étudiant américain Otto Warmbier, entré dans un coma profond alors qu’il était détenu en Corée du Nord, le 19 juin 2017, Donald Trump a dénoncé le régime brutal de Pyongyang. Le 26, il appelait « à s’occuper rapidement du dossier nord-coréen et de la menace que représente ses programmes nucléaire et balistique ». Tandis que le porte-avion USS Carl Vinson qui patrouillait en mer du Japon au printemps est sur le chemin du retour vers San Diego, Nikki Haley a prévenu le 5 juillet « que l’une des options résidait dans la force militaire américaine ». Afin d’éviter que le bâtiment militaire ne passe trop près de ses côtes, Pyongyang menaçait ouvertement de l’envoyer par le fond. Depuis le partage de la péninsule par la guerre de Corée, en 1953, les Américains avancent avec méfiance dans la région. Maintenus en-deçà du 38e parallèle par le régime communiste et ses alliés soviétiques et chinois, ils y ont ensuite subi des pertes. En 1968, l’USS Pueblo, un navire de collecte de renseignement américain, était arraisonné par les soldats nord-coréens. Un an plus tard, l’aviation de la république populaire abattait l’EC-121, un avion de reconnaissance américain qui survolait la mer du Japon. Attisées par l’embargo de fait imposé par les États-Unis, les tensions s’aplanissent légèrement lorsque l’Union soviétique tombe et que la Chine renouvelle son logiciel. Plongée dans une crise économique mais également politique et diplomatique, la Corée du Nord rejoint la table des négociations. En 1994, après avoir été convaincue de production de plutonium, elle promet d’arrêter le développement de son programme nucléaire. « Dans les documents déclassifiés de la CIA, on voit que tout le monde était alors persuadé que le régime allait s’effondrer », constate Antoine Bondaz. Au lieu de cela, il est parvenu à mettre fin aux grandes famines des années 1990 et à lancer de nouveaux partenariats.
Les otages mutuels
Dès sa naissance sur les cendres de l’Union soviétique, la Fédération de Russie tourne le dos à la Corée du Nord en reconnaissant son frère ennemi du sud en 1991. « C’est la fin de l’aide au développement fournie par Moscou », observe Antoine Bondaz. Cela met en délicatesse l’économie de la république populaire. La Chine, qui attend un an pour reconnaître Séoul, est loin d’opérer une semblable rupture. Elle ouvre la première zone économique spéciale sur le territoire nord-coréen, à Rason, pour profiter d’une main d’œuvre abondante, éduquée, disciplinée et dont la modestie n’est pas la moindre des qualités. Les salaires sont trois à six fois moins élevés sous le fleuve Yalou. Menée par Deng Xiaoping à compter de son arrivée au pouvoir en 1978, la réforme de l’économie chinoise se propage par touches impressionnistes en Corée du Nord. Lors de sa visite à Pyongyang, deux ans avant de prendre les rennes, le dirigeant du géant asiatique n’a pas laissé Kim Il-sung complètement insensible à ses arguments. En 1983, ce dernier lui rend à son tour visite. Le fondateur du Juche – l’idéologie autocratique nord-coréenne – passe par la zone économique spéciale de Shenzhen avec son fils, Kim Jong-il. Un an plus tard, il signe la première loi sur les investissements étrangers.
« Ce transfert de politiques publiques chinoises s’est mis en place de manière progressive », explique Théo Clément. « Les Nord-Coréens ont attendu de voir les effets que cela pouvait avoir sur leurs voisins, afin notamment de savoir si le régime en sortirait affaibli. » Bien qu’elle soit limitée, cette mue se poursuit au rythme des ouvertures de nouvelles zones économiques, c’est-à-dire à peu près tous les dix ans. Au-delà de ces initiatives et du fond idéologique commun, « les relations n’ont jamais été très bonnes », tempère le chercheur. L’accord de défense signé en 1961 ne s’est guère traduit par beaucoup d’échanges militaires de haut niveau. Le fait que la Chine participe aux pourparlers à six États (Corée du Nord, Corée de Sud, États-Unis, Japon, Russie et Chine) ouverts en 2003 afin de résoudre les questions de sécurité posées par le programme nucléaire nord-coréen ne leur a pas réellement donné plus de chances d’aboutir. Après un premier essai nucléaire en 2006, Pyongyang en réalise un deuxième en 2009 et exclue tous les inspecteurs étrangers de son territoire. Au contraire, jaloux de leur souveraineté, les deux États se tiennent à distance respectable. Ils « sont plus des otages mutuels que des alliés », analyse Antoine Bondaz. « Leur alliance est de circonstance. » Sans le pétrole exporté par Pékin, la survie de Pyongyang serait menacée. Mais la chute du régime est porteuse de quantité d’incertitudes. Elle entraînerait à n’en pas douter un afflux de réfugiés massif vers l’Empire du milieu et ouvrirait la voie à une réunification des deux Corée. Or, il y a de fortes chances que ce scénario se déroule aux bénéfices du Sud et sous l’égide des États-Unis, ce qui inquiète la Chine. Le nouveau grand État pourrait revendiquer certaines régions chinoises où sont établis beaucoup de Coréens.
Malgré ce risque, « les relations se sont dégradées entre les deux pays », estime Théo Clément. Pour l’heure, le trafic sur le pont de l’Amitié est toujours dense. Les échanges ont même crû de 37 % au premier trimestre de 2017. Cela dit, « la Chine transpose des sanctions économiques dans son droit et, vu l’augmentation du prix de l’essence, on peut penser qu’elle joue avec le robinet du pétrole. » Pour se fournir en combustible, Pyongyang se tourne vers un pays avec lequel les relations se sont au contraire réchauffées : la Russie.
Un homme très moderne
Au sein du conseil de sécurité des Nations Unies, la Chine n’est pas seule à refréner les envies de sanctions des États-Unis. Selon une source diplomatique citée par le quotidien russe Izvestia, Moscou mettra son veto à l’embargo sur les livraisons d’hydrocarbures qu’envisage de proposer Washington. Ce serait se priver d’un débouché : en avril, mai et juin 2017, la vente de produits pétroliers à la Corée du Nord lui a rapporté 31 millions de dollars, à en croire les chiffres des douanes russes. Les exportations de fioul, d’huile pour moteur, d’huile hydraulique et de lubrifiants ont elles enregistré une augmentation de 205 % par rapport à 2016. La personnalité de Vladimir Poutine n’est pas étrangère à ce bond. En mai 2017, le président russe a appelé au « dialogue » avec Pyongyang quoiqu’il soit fermement opposé à son programme nucléaire. Lequel s’est développé avec le soutien des Soviétiques à partir des années 1960. « Il faut », d’après lui, « arrêter d’intimider la Corée du Nord et chercher une solution pacifique à ce problème ». À son arrivée à la magistrature suprême, en 2000, l’ancien membre du KGB « a tenté de normaliser la relation » avec la Corée du Nord, narre Antoine Bondaz. Sitôt élu, il a rendu visite à Kim Jong-il, un homme selon lui « très moderne » qui lui renverra la politesse.
Au cours de la décennie, plusieurs projets sont esquissés en matières ferroviaire et énergétique, cependant que Moscou condamne systématiquement les essais nord-coréens. La construction d’un gazoduc acheminant le gaz russe vers la Corée du Sud, via le Nord, est évoquée en 2011 lors de la rencontre entre Kim Jong-il et le président Dmitri Medvedev. En 2014, une partie des voies ferrées traversant la frontière russo-coréenne sont rénovées afin de permettre au charbon russe d’être exporté via la zone économique spéciale portuaire de Rason. Cette année-là, les sanctions occidentales prises en réaction à l’annexion de la Crimée rapprochent Moscou de Pyongyang. Au mois de septembre, la Russie annonce l’effacement de 90 % de la dette de 11 milliards de dollars (8,4 milliards d’euros) dont la Corée du Nord était débitrice. Le milliard restant servira au développement de projets communs, explique le vice-ministre russe des Finances, Sergueï Stortchak. Le fameux gazoduc revient sur la table. Des accords sont aussi signés pour permettre à des Nord-Coréens de venir en Russie, une pratique qui s’est souvent exercée sous le boisseau. À la suite d’ouvriers venus travailler dans les usines de transformation de poisson soviétiques après la guerre de Corée, des criminels et opposants sont envoyés dans les forêts du grand est à la fin des années 1960. Au cours d’une rencontre tenue secrète, en 1966, Leonid Brejnev et Kim Il-sung s’entendent pour faire bûcheronner 15 000 à 20 000 personnes. Aujourd’hui, remarque l’historienne de Vladivostok Larisa Zabrovskaya, « plus besoin de vider les prisons, ce sont des volontaires qui partent dans les camps de déboisement ou qui sont employés sur des chantiers de construction. Selon les statistiques douanières, plus de 10 000 Nord-Coréens munis d’un visa de travail franchissent la frontière, chaque année. » Pour profiter de ce privilège, ils doivent verser 250 euros chaque mois aux compagnies qui les emploient. Des Nord-Coréens travaillent aussi selon toute vraisemblance sur les chantiers de la Coupe du monde de football 2018. Reste que le profit que tire Moscou de cette exploitation est limité. « La Russie est plus intéressée par la Corée du Sud », souligne Antoine Bondaz. « Mais le Nord peut servir d’interface entre les deux. » D’autant que Séoul est enclin à reprendre langue avec Pyongyang.
Le 38e parallèle
La zone démilitarisée tracée le long du 38e parallèle à la fin de la guerre de Corée n’a pas empêché les échanges, bien ou mal intentionnés. Plus de 50 ans après l’armistice et alors qu’aucun traité de paix n’a jamais été signé, le nouveau président sud-coréen Moon Jae-in veut relancer la coopération avec le Nord. Arrivé au pouvoir en mai 2017, ce membre du parti démocrate (centre gauche) succède à la conservatrice Park Geun-hye, destituée pour corruption et incarcérée. Sous le mandat de Jae-in, Séoul et Pyongyang ne deviendront sûrement pas alliés, mais renoueront peut-être avec une coopération qui existait déjà dans les années 1990.
Fidèle à sa rhétorique, le régime nord-coréen a publié un communiqué, en juin 2017, dans lequel il déclare sa volonté d’imposer « la peine de mort à la traîtresse Park Geun-hye ». À maintes reprises, il a tenté d’assassiner des officiels voisins. En janvier 1968, le commando de 31 hommes envoyé à la résidence présidentielle a été stoppé à temps. L’attentat de Rangoon fomenté contre président sud-coréen Chun Doo-hwan au Myanmar a lui fait 17 morts parmi son entourage dont quatre ministres. Mais de même que la Corée du Nord s’est ouverte à des coopérations ciblées avec Pékin, elle a aussi développé des partenariats avec Séoul après la chute de l’Union soviétique. Après leur admission conjointe à l’ONU en 1991, les deux Corée ont entamé un dialogue qui a abouti à l’exploitation conjointe du site touristique des monts Kumgang, situés dans le nord-est de la Corée du Nord. En 1999, le groupe sud-coréen Hyundai a créé une filiale, Asan, pour gérer les flux touristiques. Huit ans plus tard, 300 000 visiteurs s’y pressaient chaque année, apportant une manne importante pour Pyongyang. En 2002, la zone industrielle commune de Kaesong a été ouverte. Mais ces efforts ont été balayés par un coup du sort et un coup de volant politique. En 2008, l’exécution d’une touriste égarée dans une zone interdite en marge des monts Kumgang par des soldats nord-coréens a entraîné la fermeture du site. Et, quelques mois plus tard, le nouveau président conservateur sud-coréen Lee Myung-bak a décidé de fermer Kaessong. Tandis que jusqu’ici, « la Corée du Sud était son principal partenaire avec le Chine », selon Antoine Bondaz, sa part dans la balance commerciale nord-coréenne s’est érodée. Mais, entre 2007 et 2016, le commerce bilatéral représentait tout de même environ deux milliards de dollars par an.
Les non-alignés
Dans la région, des partenariats commerciaux ont aussi existé avec le Japon sous l’impulsion de Jun’ichirō Koizumi, Premier ministre nippon de 2001 à 2006. Mais son départ et l’alliance militaire de Tokyo avec Washington ont éloigné Pyongyang. En Malaisie, c’est l’assassinat du fils aîné de feu le président Kim Jong-il par des envoyés nord-coréens le 13 février 2017 qui a compliqué les choses. « Cela a créé un malaise alors qu’il existe des réseaux nord-coréens sur place comme à Singapour », explique Antoine Bondaz. Quelque 300 Nord-Coréens travaillent dans les mines de charbon malaisiennes de Sarawak. Même si son modèle économique est radicalement différent de celui de Pyongyang, la petite république singapourienne était quant à elle son dixième partenaire le plus important en 2010. Lors de la réception du président de l’Assemblée populaire suprême de Corée du Nord, Kim Yong-nam, en août 2007, le président de Singapour a rappelé les liens qui existent entre les deux États « non-alignés ». Pyongyang a de longue date cherché à établir des contacts avec ceux qui refusaient la tutelle américaine. En 1975, le régime a réussi à devenir membre du Mouvement des non-alignés. Mais son soutien à des mouvements insurrectionnels comme le FLN en Algérie l’a rendu infréquentable pour quantité de pouvoirs en place. Après la tentative d’assassinat du président sud-coréen dans sa capitale, Rangoon, en 1983, le Myanmar a mis fin à sa reconnaissance de la Corée du Nord. Une fois la crise des années 1990 passées, les relations diplomatiques ont été rétablie en 2007 permettant aux Birmans d’importer du matériel militaire nord-coréen contre de la nourriture. Le conseiller diplomatique de Barack Obama pour la zone Asie-Pacifique soupçonnait même, en 2016, l’existence de « poches résiduelles » parmi la junte birmane qui maintenaient « des interactions » avec la Corée du Nord. Plus au nord, alors que beaucoup de programmes de coopérations avec des pays d’Asie centrale ont disparu, « la Mongolie est de plus en plus présente en Corée du Nord », confie Théo Clément. « Car ce pays enclavé a besoin de l’accès à la mer que Pyongyang peut lui offrir. »
En tant que membre des non-alignés, l’Inde a officiellement engagé un dialogue avec la république populaire en 1973. Mais cette dernière ayant recours au Pakistan pour développer son programme nucléaire, la discussion a tourné court. Le père de la bombe atomique pakistanaise, Abdul Qadeer Khan aurait vendu des plans d’arme nucléaire compacte selon un ancien inspecteur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), David Albright. Aujourd’hui, « on a peu d’informations officielles sur les liens entre Islamabad et Pyongyang », reconnaît Antoine Bondaz. En revanche, l’Inde est discrètement devenue un partenaire commercial majeur de la Corée du Nord. Après avoir donné 2 000 tonnes de nourriture et de semences en 2002 et 2004 pour y combattre la faim, elle a vu ses échanges passer de dix millions de dollars au milieu de la décennie à 60 millions en 2013. « Certaines sources citent l’Inde comme deuxième partenaire commercial de Pyongyang devant la Russie », ajoute le chercheur. En dehors du Pakistan, l’Iran, est soupçonné d’entretenir une coopération technique sur les questions militaires avec la dictature est-asiatique. « Les premiers missiles balistiques acquis par l’Iran venaient de Corée du Nord », rappelle Antoine Bondaz. « Il s’agissait de missiles soviétiques que la Corée du Nord avait achetés à l’Égypte et qui étaient revendus à Téhéran. Dans les années 1990, on pouvait parler de vraie coopération militaire. » À ce jour, les informations recoupées manquent, ce qui est également le cas concernant la Syrie. En 2007, un réacteur nucléaire syrien détruit par une frappe israélienne aurait été construit avec l’aide de la Corée du Nord. Selon un rapport des Nations Unies commis trois ans plus tard, Pyongyang participe aux programmes balistiques de la Syrie, de l’Iran et du Myanmar. Un navire faisant route vers la Syrie avec des masques à gaz à son bord a été intercepté en 2013 par les autorités turques. Sa cargaison proviendrait elle aussi de la république populaire. « Plus les régimes sont autoritaires, plus ils peuvent avoir des relations » avec la Corée du Nord, résume Bondaz. Quelques pays africains comme l’Ouganda et le Zimbabwe ont ainsi noué des liens commerciaux. Mais la Corée du Sud fait pression afin qu’ils les rompent. « Beaucoup d’entre eux ont peu d’intérêt à être associé à la Corée du Nord, qui n’a pas grand chose à apporter », juge Antoine Bondaz. Tant qu’elles restent de volume limité, ces connexions prospèrent dans l’ombre. Mais personne ne peut raisonnablement se permettre d’afficher un soutien indéfectible à Pyongyang sous peine de s’aliéner une large partie de la communauté internationale.
Couverture : Qui sont les alliés de Pyongyang ? (KCTV)