C’est un lundi matin ensoleillé à Hanover Park, un township poussiéreux de la banlieue est de la ville sud-africaine du Cap, et deux hommes en survêtement se tiennent à l’extrémité d’un square. Une foule se forme sur la place, attirée par une fête de quartier qui vise à sensibiliser les gens sur le VIH, qui touche l’Afrique du Sud plus que tout autre pays du monde. Des bénévoles font circuler des fiches d’inscription pour un dépistage gratuit du virus, tandis qu’un groupe de jeunes filles revoient leurs pas de danse pour le spectacle à venir. Pour les jeunes qui grandissent à Hanover Park, le Sida est un réel danger. Et pourtant, c’est loin d’être le seul et sûrement pas celui qui saute le plus aux yeux. Car Hanover Park est l’un des quartiers les plus violents de Cape Town, la ville au taux d’homicide le plus élevé d’Afrique –exception faite des zones de guerre.
Hanover Park
Les deux hommes en survêtement, Albert Matthews et Glenn Hans, sont des figures bien connues du banditisme local. Et lorsqu’en milieu de matinée, la nouvelle leur parvient que des coups de feu ont été tirés à quelques pas d’ici, le duo se met à marcher avec assurance en direction des tirs. Mais l’époque où les deux hommes faisaient partie des gangs du coin est bien révolue. Aujourd’hui, ils cherchent à empêcher de nouvelles fusillades d’avoir lieu. Dans le dos de leur veste noire et jaune, on peut lire le nom de leur association brodé en grosses lettres : « CeaseFire », ou « cessez-le-feu ».
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À l’autre bout du monde, à Chicago, le temps est à l’incertitude pour CeaseFire Illinois, l’association de lutte contre la violence mise en lumière dans The Interrupters, un documentaire réalisé en 2011. Fondée en 1995 par le docteur Gary Slutkin, CeaseFire Illinois lutte contre la violence armée au moyen d’une approche axée sur la santé publique. Elle emploie d’anciens membres de gangs repentis comme « interrupteurs de violence », des individus qui développent avec le temps des liens avec les personnes à risque (jugées capables de commettre des actes de violence). À travers ces relations, les « interrupteurs » essayent de dissuader ces potentiels futurs agresseurs de recourir aux armes pour régler leurs conflits.
The Interrupters a valu des éloges à l’association, qui s’est développée au-delà des frontières de Chicago : un réseau d’une vingtaine de sites à travers tout l’État. Et en 2000, Slutkin a lancé une association à part, Cure Violence, dans le but d’exporter le modèle de CeaseFire dans d’autres États et d’autres pays du monde. Mais si Cure Violence a réussi à diffuser à l’international sa méthode axée sur la santé publique, CeaseFire Illinois, le site initial où Slutkin a mis son modèle à l’épreuve, connaît de lourdes coupes budgétaires. En mars dernier, le gouverneur de l’Illinois Bruce Rauner a annoncé un gel des dépenses impliquant la suspension immédiate d’une subvention de l’État pour CeaseFire Illinois de 4,7 millions de dollars. 17 des 24 sites de l’association ont ainsi été fermés pour une durée indéterminée, et la question des subventions pour l’année prochaine reste en suspens. Néanmoins, derrière l’incertitude qui monopolise l’attention des journalistes, on oublie souvent de parler du travail quotidien des membres de l’association sur le terrain, observable à des milliers de kilomètres de Chicago. Lors de séances de formation, les antennes de l’association reçoivent les conseils de Cure Violence et intègrent son modèle, que plus de cinquante sites à travers le monde mettent en pratique. Ils emploient ainsi d’anciens membres de gangs dans des quartiers à risque pour désamorcer les conflits avant qu’ils ne s’enveniment et dégénèrent. L’un de ces sites se situe dans la banlieue du Cap, à Hanover Park, un quartier ouvrier régulièrement en proie à la violence. Quelques heures suffisent pour prendre la mesure des défis auxquels l’association est confrontée, ainsi que les progrès qu’elle parvient malgré tout à y réaliser.
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De retour à Hanover Park, Hans et Matthews s’éloignent rapidement de la place en direction de la source des coups de feu, après qu’un habitant du quartier est venu leur faire un compte rendu de la fusillade.
« Un lundi matin », déclare Hans, 30 ans, alors qu’il accélère le pas. « Ce n’était encore jamais arrivé. » Pour Hans et Matthews, les blagues et les bavardages vont habituellement bon train. Mais à présent, leur sourire s’évanouit au profit d’un air grave tandis qu’ils se dirigent vers les lieux. Sur le chemin, ils croisent la mère d’un jeune garçon récemment tué dans une fusillade. Ils repèrent également Wilfred McKay, un autre membre de CeaseFire, qui leur apprend qu’il se trouvait à moins de 50 mètres de l’endroit où la fusillade a eu lieu. McKay, 43 ans, affiche des couleurs vives et un large sourire. En y regardant de plus près, on aperçoit aussi un petit tatouage de gang, gagné au cours d’une des onze années qu’il a passées en prison. McKay guide Hans et Matthews vers les lieux. Tandis qu’ils marchent jusqu’à la scène de la fusillade, les deux hommes parlent en afrikaans, la langue maternelle de la majorité des habitants de Hanover Park. Plus de vingt ans après la fin de l’apartheid, les townships sud-africains restent profondément touchés par la ségrégation, et les habitants de Hanover Park font partie d’une communauté mixte parlant l’afrikaans, dont les racines sont profondément ancrées dans la région du Cap. Quelques pâtés de maisons plus loin, Hans et Matthews décident de quitter la route principale qui sert de frontière aux deux gangs du coin. Ils passent près d’étals de fruits et d’une échoppe vendant saucisses, burgers et poulets. Une voiture les dépasse à vive allure, qui attire l’attention de Matthews.
Cessez-le-feu
Bien qu’il soit devenu l’une des destinations touristiques les plus prisées au monde (en 2014, le New York Times l’a élu première ville de son classement), le Cap reste un endroit difficile à vivre pour bon nombre de ses habitants. La peur liée aux crimes violents est présente même dans le centre prospère de la ville, où les villas des quartiers chics s’entourent de murs et de clôtures électriques. Mais le plus fort de la violence a lieu dans les townships, en périphérie de la ville, comme une cicatrice encore vive de l’apartheid. Des townships comme Mitchell’s Plain, Khayelitsha et Gugulethu, plus vastes que Hanover Park, concentrent une plus grande partie de la violence qui sévit au Cap. En comparaison de Hanover Park, qui compte 45 000 habitants, la population de Khayelitsha est estimée à plus d’un million de personnes. Cependant, c’est un bien maigre réconfort pour les habitants de Hanover Park, classée parmi les zones les plus violentes de la ville, proportionnellement à sa population. En fin d’année dernière, sur une période de trente jours, seize habitants du quartier ont été tués par balles. Dans ses rues étroites et denses, personne n’est à l’abri de l’ « épidémie » – un mot utilisé sciemment par Cure Violence. CeaseFire Hanover Park opère depuis le deuxième étage du First Community Resource Centre, un ministère ecclésial qui gère un certain nombre de programmes d’aide sociale. À travers les vitres du bâtiment, le personnel entend parfois résonner des coups de feu. Durant la montée de violence de ces fameux trente jours, le pasteur Craven Engel affirme qu’on entendait des détonations tous les jours.
Charismatique de nature, Engel respire l’assurance et la conviction qui vont de pair avec son travail de gérant de CeaseFire Hanover Park. Originaire d’Athlone, un quartier tout proche, Engel a connu personnellement l’attrait que peuvent avoir les gangs. Lui et ses amis avaient à l’époque fondé une bande qui s’est transformée en gang. Mais il s’en est sorti. Poursuivant d’abord une carrière de graphiste, il est ensuite devenu dessinateur publicitaire. Il a rejoint le ministère il y a maintenant quinze ans. En tant que pasteur, il s’efforçait déjà de sortir les jeunes du quartier de la drogue et de la violence, qui coûtent bien trop de vies. Les deux maux sont intimement liés : les drogues attisent l’appât du gain des gangs, et l’accès répandu aux substances bas de gamme comme le tik, un narcotique extrêmement addictif et populaire – car bon marché – dans les townships sud-africains, complique les efforts mis en œuvre pour promouvoir la résistance et la responsabilité au sein de la jeunesse. Dès le départ, Engel a mis l’accent sur la réhabilitation, cherchant pour l’aider des gens crédibles aux yeux de la rue, mais désireux de laisser derrière eux un héritage positif. En 2010, il a entendu parler de l’association de Chicago, qui traitait le problème de la violence armée comme une épidémie relevant d’un problème de santé publique. Le créateur de CeaseFire, le docteur Slutkin, espérait ralentir la « transmission » de la violence comme un docteur essaierait de traiter des maladies infectieuses : en identifiant les gens les plus enclins à propager le mal, et en travaillant à « interrompre » le processus. « Mon Dieu », se souvient-il avoir pensé, « c’est exactement ce qu’il nous faut ! »
Hans et Matthews atteignent enfin le site de la fusillade, au pied de longues rangées d’immeubles qui se dressent de part et d’autre d’une rue principale servant de frontière entre deux territoires de gangs. Ils passent la rue au peigne fin mais ne trouvent aucune douille : certaines armes, comme les revolvers, n’en laissent pas derrière elles. Il n’y a pas non plus de témoins. Aussi, les deux hommes ne s’éternisent pas et reviennent sur la place, où la fête de quartier se poursuit. Deux membres du service de police sud-africain, qui travaillent régulièrement à Hanover Park, se mêlent à la communauté. Ici, il n’y a pas de poste de police, les policiers sont affectés au poste d’un township tout proche, à Philippi. Mais les poignées de mains chaleureuses qu’ils échangent avec les habitants du quartier indiquent clairement qu’ils le connaissent bien. Lorsque je les questionne sur les relations qu’ils entretiennent avec CeaseFire, les agents me répondent qu’elles se renforcent. « Nous sommes très reconnaissants envers eux pour ce qu’ils font », assure l’adjudant T. A. Allies. « Toute aide est la bienvenue, si elle nous aide à maintenir l’ordre dans le quartier. »
CeaseFire Hanover Park enrichit jour après jour sa base données, dont ils partagent quelques-unes des informations avec la police locale, les aidant à déterminer les futures zones sensibles. Pourtant, à l’instar d’autres antennes fonctionnant sur le même mode, CeaseFire ne partage pas de tuyaux spécifiques avec la police. D’après eux, faire une telle chose pourrait nuire à leur crédibilité au sein de la communauté. Comme dans d’autres villes, ce choix n’a pas manqué de créer quelques tensions entre l’association et la police. « Nous ne surveillons pas les travailleurs de CeaseFire », affirme le second policier, Ettiene Conradie. « Tout ce qu’on sait, c’est que ce sont des gangsters repentis… mais à quel point ils le sont, ça on n’en sait rien. »
Le shooter
Subventionnée par la ville du Cap, l’association CeaseFire Hanover Park emploie un nombre restreint de gens qui entretiennent des liens étroits avec des gangs du coin. Lorsqu’ils évaluent une recrue potentielle, les superviseurs se réfèrent à un tableau qui comprend des catégories comme « crédible auprès de ces groupes » (pour l’essentiel une liste de gangs et de factions) et « zones de crédibilité ». Plus un candidat coche de cases, plus il est précieux pour l’association, même si chacun est amené à travailler en collaboration avec d’autres membres afin de gagner en crédibilité dans davantage de zones du quartier. Pour réussir à CeaseFire, il ne suffit pas de connaître le dernier morceau à la mode dans la rue. Les travailleurs sociaux comme Albert Matthews passent le plus clair de leur temps à conduire à travers Hanover Park et à s’arrêter pour discuter avec les jeunes du quartier, afin d’établir une connexion sociale qui les aidera par la suite à récolter des informations sur l’heure et le lieu où des conflits risquent d’éclater. Lorsque ce risque se présente, les « interrupteurs de violence » prennent la relève et viennent à la rencontre des chefs de gangs pour résoudre le conflit grâce à des moyens pacifiques, les dissuadant de contre-attaquer en recourant à la violence. Pour cela, il faut savoir garder la tête froide dans des circonstances d’une extrême dangerosité, avoir un sens de l’humour considérable et faire preuve d’une grande loyauté envers l’association. Un ancien employé a « déserté » les rangs de CeaseFire – comme disent ses employés – pour retourner frayer avec les gangs tout en revêtant les habits de l’asso. De tels actes nuisent beaucoup à la crédibilité de CeaseFire, auprès de la police comme auprès des gangs, et augmentent les risques déjà importants que courent les autres membres de l’association.
Bravoure, engagement et créativité : des qualités nécessaires pour réussir à CeaseFire.
Toutefois, dans l’ensemble, ces derniers font à la fois preuve de bravoure, d’engagement et de créativité. Des qualités nécessaires pour mener à bien la tâche difficile qui leur incombe. Savoir rire de soi et de sa condition semble faire partie des critères d’embauche. « Je peux raconter beaucoup de conneries ! » se vante McKay. Matthews renchérit : « Ils disent que les mecs de CeaseFire sont dingues, parce que dès qu’on entend des tirs, on fonce droit vers eux. » Un jour, alors qu’il était en voiture avec sa femme, McKay a vu un jeune du coin braquer son arme sur quelqu’un. Bondissant du véhicule, McKay l’a interpellé et le garçon l’a reconnu. Il a alors tiré en l’air avant de prendre la fuite – une ruse pour faire croire à ses partenaires qu’il avait bien essayé de toucher sa cible, selon McKay. Albert Matthews se souvient pour sa part d’une fois où il a croisé le chemin d’un gang se préparant à déclencher une fusillade. En amoureux de belles mécaniques, il a ouvert le capot de sa voiture et exhibé son moteur aux membres du gang, les distrayant jusqu’à ce que les tensions s’apaisent et que la raison l’emporte. Ces belles réussites sont devenues la fierté du personnel de CeaseFire, mais il y a bien sûr un revers à cette médaille. McKay héberge souvent chez lui des bénévoles avec lesquels il travaille, afin qu’ils aient un endroit où se cacher et se désintoxiquer lorsqu’ils traversent une mauvaise passe. L’un d’eux a fini par forcer une voiture et voler le fils de McKay, probablement pour financer son addiction. Mais le plus dur évidemment, c’est quand des collègues de longue date trouvent la mort à cause de la violence. McKay devient grave lorsqu’il évoque le souvenir tragique de la mort par balle d’un collègue avec lequel il a travaillé durant huit ans. « C’est comme de perdre un fils », me confie-t-il. En plus de maintenir un rapport entre son personnel et les jeunes du quartier, CeaseFire organise des rencontres à l’improviste entre les jeunes, l’occasion pour les gangs en conflit de discuter face à face. Organiser de telles rencontres exige une préparation minutieuse. Il est arrivé, avant l’un de ces face à face, que des travailleurs sociaux demandent à la dernière minute aux membres des gangs de se préparer pour qu’on vienne les chercher, ceci car ils craignaient que dévoiler le lieu de la rencontre ne pousse l’un des gangs à fomenter une embuscade.
Ils ont ensuite conduit les jeunes dans un centre commercial tout proche, où la rencontre s’est tenue dans un fast food. Pour minimiser les risques de violence, le personnel avait appelé le restaurant à l’avance pour demander à ce que les tables soient débarrassées des couteaux et des fourchettes. La rencontre a pris fin au beau milieu du repas, alors que les jeunes se sont écharpés avant de sortir en trombe. Heureusement, personne n’a été blessé. Les progrès sont peut-être lents, mais d’après Engel, le fait de faire asseoir à la même table les membres de différents gangs est déjà un succès en soi. Toutefois, malgré toutes les actions qu’organise CeaseFire, la violence reste monnaie courante à Hanover Park.
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Durant ses virées à travers le township, Matthews s’arrête sans cesse pour saluer des groupes de jeunes. Les poignées de mains et les sourires viennent naturellement, on échange des signes de paix et certains crient « CeaseFire ! » avec enthousiasme à son approche. Pourtant, le respect qu’ont les jeunes pour les membres de l’association n’a pas rendu les rues paisibles. L’influence des drogues dans la violence des gangs est prépondérante. CeaseFire chapeaute des programmes intensifs en internat sur des sites situés à l’extérieur du township, afin de donner aux drogués un endroit dans lequel ils peuvent réfléchir à leur avenir. La demande surpasse l’offre de loin.
Au volant de sa voiture, Matthews emprunte une rue étroite et aperçoit un jeune homme qu’il connaît, debout contre l’entrée d’un garage. Le jeune homme, qui demande à rester anonyme, porte un jogging gris et des tongs en plastique orange. Il s’approche pour parler avec Matthews dans sa voiture, et à plusieurs reprises, ses yeux parcourent la rue dans les deux sens. De temps à autre, quelqu’un s’approche. Ils se saluent alors en afrikaans. Des pièces changent de mains, suivies de petits sachets. « Pour être honnête, je suis un gangster », dira plus tard le jeune de 23 ans à l’arrière de la voiture de Matthews. « Je vends de l’héro », continue-t-il. « Seulement de l’héro. » À 20 ou 25 rands la dose (soit 1,30 à 1,80 euro), les petits sachets d’héroïne qu’il vend suffisent à faire planer jusqu’à quatre personnes. Quand le dealer avait quatre ou cinq ans, son frère, adolescent à l’époque, a été tué par balle. Voilà pourquoi, depuis son plus jeune âge, il pense que c’est sa voie. Pour Matthews, le contact avec des gens très impliqués dans la vie criminelle semble venir naturellement. Son chemin vers CeaseFire a débuté il y a environ dix ans, après trois passages en prison pour possession de drogues. Vaguement affilié à un gang local, Matthews consommait régulièrement du tik. Un samedi après-midi dont il se rappelle clairement, un de ses amis s’est pris quatorze balles juste sous ses yeux. Il est mort dans ses bras.
Matthews se souvient s’être demandé : « Est-ce que tu veux vraiment crever comme ça ? »
Le mardi suivant, lui et ses amis ont tagué un mur en l’honneur du jeune homme. Le lendemain, l’un d’eux s’est fait tirer dessus et en est mort. Cela a été le moment décisif pour Matthews. Il se souvient s’être demandé : « Est-ce que tu veux vraiment crever comme ça ? » Depuis, c’est une question qu’il espère transmettre aux jeunes qui évoluent encore dans la rue. Lors d’un autre trajet dans les rues d’Hanover Park, Matthews repère un adolescent devant une maison, en train d’ouvrir un portail en jetant des coups d’œil furtifs vers la rue. Quand le garçon aperçoit Matthews, le portail se referme. Ralentissant la voiture, Matthews se fait la réflexion que le jeune homme doit être en train de se débarrasser d’une arme ; l’instant d’après, ce dernier réapparaît les mains vides. « Ce gars-là a un gros appétit », remarque Matthews en guise d’introduction, tandis que le garçon, bien en chair, s’approche de la voiture. Tout le monde rigole. L’adolescent salue Matthews et McKay, assis sur le siège passager. Après un bref échange en afrikaans, les trois hommes se disent au revoir et Matthews poursuit sa route. « Il a travaillé comme bénévole pour nous, il y a plus d’un an », explique McKay. Mais après le décès d’un ami, le garçon a eu peur pour sa sécurité. Il a quitté le programme de CeaseFire dans lequel il était impliqué, et dans la rue, il a maintenant la réputation d’être un shooter. « C’est un tueur », explique McKay.
Quelques jours plus tard, le jeune homme en question est à la tête d’un petit groupe de jeunes qui font une visite à l’improviste dans les bureaux de CeaseFire. Les travailleurs sociaux semblent surpris de les voir. Ignorant complètement le panneau à l’accueil disant que le pasteur Engel n’est disponible que sur rendez-vous, ils demandent à le voir. Quelques instants plus tard, le pasteur se montre et les invite à entrer.
Traduit de l’anglais par Anastasiya Reznik d’après l’article « When We Hear Shots, We Run Toward Them », paru dans Roads and Kingdoms. Couverture : Deux membres de CeaseFire Hanover Park, par Emily Jan.